Le règlement de copropriété, source de droit du travail

Date de publication :

26/03/2010
Cour de cassation - Assemblée plénière - 5 mars 2010

Par un arrêt émanant de sa formation la plus solennelle, l'Assemblée Pleinière de ma Cour de cassation met fin au conflit opposant un couple de gardien d'immeuble et son employeur, le syndicat de copropriétaires de l'immeuble suite à leur licenciement en novembre 2001.

Un peu moins de dix années plus tard, après que les parties se soient opposées devant le Conseil de Prudhommes, la Cour d'appel, La chambre sociale de la Cour de cassation, une autre Cour d'appel et enfin devant l'Assemblée Pleinière, il est désormais définitivement jugé que leur licenciement était abusif, leur ouvrant droit respectivement à 9 000 € et 2 000 € d'indemnité.

Si la procédure fut si longue, c'est que la question à trancher était ardue.

Les débats ne portaient pas sur le fond du licenciement, mais uniquement sur la forme.

Le couple avait été licencié directement par le syndic comme le prévoit l'article 31 du décret du 17 mars 1967 fixant le statut de la copropriété.

Il existait cependant une disposition du règlement intérieur de copropriété prévoyant que la décision de licencier devait être précédée de l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires.

Cette clause était cependant contraire au statut du syndic rendu obligatoire et réputant non écrite toute clause contraire.

La Cour de cassation tranche le débat en approuvant la cour d'appel pour avoir considéré que l'absence de contestation en nullité de la clause devant un juge, son application pouvait être revendiquée par les salariés.

Par cet arrêt la Cour accueille donc le règlement de copropriété dans cette catégorie des sources du droit social, après avoir longuement hésité, puisque la solution finale était contraire à celle rendue quelques années plus tôt par la Chambre sociale de la Cour.

Le dernier obstacle juridique, à savoir la contradiction entre le texte du règlement qui rend nécessaire l'autorisation de l'assemblée générale et le statut légal du syndic qui lui réserve ce pouvoir, la Cour le résoud en énonçant que la clause ne pouvait priver le syndic de son pouvoir mais l'obligeait à consulter l'Assemblée pour recueillir son avis.

La solution si elle n'est pas juridiquement sans reproche a le mérite d'opter pour la voie la plus protectrice des droits du salarié.

Dès lors la Cour n' a plus qu'à appliquer une jurisprudence bien établie considérant que priver un salarié des garanties procédurales plus favorables instituées par une source de droit du travail constitue une irrégularité de fond privant le licenciement de cause réelle et sérieuse.

On pourra noter que s'agissant de de la question de la gratuité du logement de fonction des gardiens d'immeuble, la chambre sociale avait, dans un arrêt du 27 mars 2001, rendu une solution similaire mais avait postérieurement modifié sa position par un arrêt du 18 janvier 2006, en excluant l'engagement unilatéral en cas de disposition contraire du contrat de travail.

Cette dernière solution semblait remettre en cause la décision de 2001, puisqu'un engagement unilatéral, comme l'usage, devrait primer les dispositions moins favorable du contrat de travail.

En l'état, on peut penser que la solution retenue par l'Assemblée pleinière devrait remettre en cause celle de l'arrêt du 18 janvier 2006 et revenir à la solution de mars 2001, celle qui était applicable au moment de la rupture du contrat de travail des gardiens d'immeuble de notre affaire...