Mise à disposition de personnel : Attention aux délits de prêt de main d'oeuvre illicite et de marchandage !
Date de publication :
17/08/2011Cour de cassation - chambre sociale - 18 mai 2011
Cet arrêt est notable, non pour ses deux premiers attendus qui sont des confirmations de jurisprudence, l'une sur l'impossibilité de modifier unilatéralement la rémunération d'un salarié, l'autre sur les conséquences d'une prise d'acte de la rupture justifiée (droit à l'indemnisation du préavis et de la perte du DIF), mais pour son troisième relatif au délit de marchandage.
Il s'agissait du cas d'un salarié d'une société prété à une autre société du groupe. La société utilisatrice se voyait facturer une somme égale aux salaires et charges sociales du salarié supporté par l'entreprise préteuse.
Ce mode de fonctionnement permet à l'entreprise préteuse de justifier d'une absence de lucrativité au prêt de main d'oeuvre puisqu'elle ne fait aucun bénéfice à ce titre.
La Cour de cassation ne s'arrête cependant pas à cet examen. De surcroit elle s'intéresse à la situation de l'entreprise utilisatrice. Elle considère en effet que l'opération a un but lucratif, au sens des dispositions de l'article L 8241-1 du code du travail en ce qu'elle procure à l'entreprise utilisatrice l'économie de frais de gestion de personnels et lui permet de bénéficier d'un accroissement de flexibilité.
Cet accroissement de flexibilité est d'autant plus grand qu'en l'espèce le salarié bénéficiait d'une convention de forfait sur la base des dispositions conventionnelles applicables dans l'entreprise préteuse mais non dans l'entreprise utilisatrice. La Cour juge que le forfait ne peut être appliqué pour le travail effectué dans l'entreprise utilisatrice, ouvre droit à paiement d'heures supplémentaires, et constitue le délit de marchandage au sens des dispositions de l'article L 8231-1 du code du travail.
Vu la remise en cause des schémas mis en place dans les groupes par cette jurisprudence, le législateur a opportunément modifié les dispositions de l'article relatif au prêt de main d'oeuvre illicite pour consacrer expressément le caractère non lucratif des mise à disposition contre remboursement des seuls salaires et charges sociales.
Il sera intéressant de voir comment la Cour de cassation va appliquer sa jurisprudence du 18 mai à la nouvelle rédaction de l'article. En effet au delà du seul montant de la refacturation, le caractère lucratif était caractérisé par l'accroissement de la flexibilité de la gestion du personnel et l'absence de charges supportées à ce titre.