Téléréalité : des vacances au travail...
Date de publication :
14/08/2009Depuis dix ans qu'elle sévit sur les écrans français, la télé-réalité s'est imposée dans le monde audiovisuel comme un mode de production particulièrement rentable.
En effet, le poste le plus important de rémunération dans un programme télévisé semble être celui de ceux dont l'image apparait à l'écran.
C'est pourquoi les jeux en tous genre ont fait leur preuve comme moyen de mettre à l'antenne de nombreux personnages qui ne sont pas payés, car ils participent à un jeu et la contrepartie de leur prestation est l'espérance du gain distribué.
Allant plus loin que ces jeux où les participants ne sont mobilisés que quelques heures, la production audiovisuelle a créé la télé-réalité.
Dans cette forme de spectacles, les participants sont filmés le plus longtemps possible en restant pendant plusieurs jours (voire plusieurs semaines) en action.
Un montage des images tournées constitue l'émission diffusée parfois quotidiennement.
Les participants sont parfois défrayés, parfois rémunérés au titre de leur "droit à l'image", mais le cout reste très faible pour la production.
Beaucoup plus faible en tout cas que celui qu'auraient perçus des comédiens engagés pour jouer sous la direction des producteurs pendant le temps du tournage.
Ce qui dès l'origine semblait acquis, a fini par être jugé par la Cour de cassation le 3 juin 2009, à savoir que cette participation est en réalité un contrat de travail.
Les faits de l'espèce concernaient l'émission de TF1 (produite par GLEM) "l'île de la tentation".
La Cour applique fort logiquement les critères jurisprudentiels permettant de définir le contrat de travail.
En effet, malgré son nom trompeur, le contrat de travail ne nécessite pas la présence d'un contrat écrit en ce sens.
Cette notion s'applique en fait à toute relation de subordination entre une personne chargée d'exécuter un travail sous la direction et la responsabilité d'une autre contre rémunération.
Ainsi la Cour de cassation constate que dans l'émission en cause : '' "les participants avaient l'obligation de prendre part aux différentes activités et réunions, qu'ils devaient suivre les règles du programme définies unilatéralement par le producteur, qu'ils étaient orientés dans l'analyse de leur conduite, que certaines scènes étaient répétées pour valoriser des moments essentiels, que les heures de réveil et de sommeil étaient fixées par la production, que le règlement leur imposait une disponibilité permanente, avec interdiction de sortir du site et de communiquer avec l'extérieur, et stipulait que toute infraction aux obligations contractuelles pourrait être sanctionnée par le renvoi"''
En conséquence, elle approuve la Cour d'appel d'avoir caractérisé l'existence d'une prestation de travail exécutée sous la subordination de la société Glem, et ayant pour objet la production d'une " série télévisée ", prestation consistant pour les participants, pendant un temps et dans un lieu sans rapport avec le déroulement habituel de leur vie personnelle, à prendre part à des activités imposées et à exprimer des réactions attendues, ce qui la distingue du seul enregistrement de leur vie quotidienne, et qui a souverainement retenu que le versement de la somme de 1 525 euros avait pour cause le travail exécuté.
Ainsi le cout de production de ces émissions de téléréalité risque d'être sérieusement augmenté à l'avenir puisqu'il conviendra de fournir un contrat de travail à chacun des participants, de les payer au moins au minimum conventionnel et de cotiser auprès des organismes sociaux sur ces sommes.
Si c'est une triste nouvelle pour les producteurs et les téléspectateurs, c'est une bonne nouvelle pour les participants et les caisses de la sécurité sociale.